23 juillet 2008

Pérégrinations camarguaises


Déploiement d'images en terre arlésienne

Ça a du bon d’avoir une petite sœur nomade. Grâce à elle nous voyons du pays. Après Leuven (en Belgique), nous voici donc rendus en famille à Arles, dans le sud de la France, pour découvrir la nouvelle vie de la sœurette. Le moment était plutôt bien choisi puisque notre arrivée coïncidait tout juste avec l’ouverture des Rencontres d’Arles (ce n'était pas un hasard, mais presque !).

Beaucoup de festivités donc au programme, à commencer par
la nuit de l'année qui nous a permis de découvrir la ville de nuit, au fil de déambulations nocturnes dans les rues arlésiennes. Durant les 6 jours qui ont suivi, nous avons continué notre parcours à travers la ville au hasard des expositions
photos se trouvant, pour certaines dans des lieux chargés d'Histoire et pour d'autres dans des espaces tout à fait surprenants comme le Parc des Ateliers. La suite en images...


C'est à Christian Lacroix, célèbre couturier et créateur, que l'on doit le choix des photographes invités cette année puisque c'est à lui qu'à été confiée la programmation de l'édition 2008. Parmi eux, des grands noms de la mode comme Richard Avedon, Paolo Roversi et Peter Lindbergh, mais beaucoup venus d'autres horizons aussi.
Pour les habitués de ces Rencontres, le résultat est parait-il inattendu. Pour moi qui n'ai aucun élément de comparaison, il est tout simplement admirable.


Je vous laisse vous faire votre petite idée par vous-même en vous livrant les noms des quelques photographes qui m'ont le plus touché ainsi qu'une brève description de leurs œuvres :

* Grégoire Alexandre / ? Was it a car or a cat I saw ?
Images fantasmatiques où se confrontent les échelles, le blanc et la couleur, le vide et l'accumulation, le naturel et l'artifice.

* Françoise Huguier / Kommunalka
Fruit d'un travail qui a duré 7 ans au coeur des appartements communautaires de Saint-Petersbourg en Russie.

* Patrick Swirc / Lettre à Claire
Pendant plus de deux mois, Patrick Swirc a écrit une lettre sous forme d'un journal intime en réalisant une photographie par jour, à l'intention de Claire, femme aimée et partie, avec l'espoir non dissimulé d'une reconquête.

* Tim Walker / Images du pays des merveilles
Les images de Tim Walker réveillent des souvenirs enfouis et des mondes enchanteurs, comme celui du Chat de Chester d'Alice au pays des merveilles...

Et parmi les jeunes talents :

* Pieter Hugo / Des hyènes et des hommes
Cette série de photos a été créée lors d'un séjour au Nigeria avec une troupe de dompteurs et leurs hyènes, singes et serpents, domestiques.

* Ethan Levitas / Untitled - This is just to say
Photographies depuis 2004 du métro à New-York. Ethan Levitas photographie les trains comme des sujets individuels dont la "vie" et les "expressions" portent la marque d'une époque et d'un lieu particulier.

* Stefanie Schneider / 29 Palm, CA
La photographe allemande explore et illustre les rêves et fantasmes d'une communauté résidant sur un terrain de caravaning en plein désert californien. La lumière et le paysage désertique crééent une réalité imaginaire à laquelle sont confrontés et où se mêlent souvenirs, rêves et réel.


Pause gourmande à la Chassagnette

Les découvertes de ces derniers jours ne s'arrêtent pas à la photographie... A une vingtaine de kilomètres d'Arles, sur la route de Sambuc en pleine Camargue, nous avons trouvé un lieu polyvalent et enchanteur comme je les aime. Restaurant, Jardin, Potager bio, Cours de cuisine et Bibliothèque gourmande... C'est la Chassagnette dont voici quelques photos :


La cuisine proposée ici est concoctée par Armand Arnal, un jeune chef qui puise son inspiration dans le jardin et le potager qui l'entourent.


A la fois rustique et raffinée, la cuisine (comme le service) est sans prétention. A la carte, des plats frais et inventifs aux notes florales et aromatiques ainsi que des produits de l'agriculture camarguaise comme le riz ou le taureau. Dans ce cadre champêtre, loin de toute agitation, la succession des plats donne au repas des allures de banquet et en font un pur moment de délectation...


Pour moi ce sera le menu du midi avec : crayons en vinaigrette - condiment noix et parmesan (en entrée), seiche aux olives et safran accompagné de riz rouge de camargue (en plat) et tourte de blette à la niçoise - confiture de tomate vanillée (en dessert).







Rêve'riz dans les rizières de Camargue

Un peu plus loin, sur la même route, se trouve le Musée du riz du Petit Manusclat. C'est là une étape incontournable de tout voyage en Camargue... surtout après s'être attablé à la Chassagnette où sont servis en accompagnement le fameux riz rouge et les galettes de riz soufflé.
A notre arrivée, on est accueilli par Robert Bon, conservateur du musée en personne. Aux découvertes de ces derniers jours s'ajoute donc cette belle rencontre.

Chez les Bon, le riz est une histoire de famille puisque c'est Joseph (le père) qui a créé la société, autrefois dénommée Bongran et rebaptisée Heureuse Camargue, à l'origine du riz biologique en France. 
Robert (le fils) a pris la relève en dirigeant à son tour la société. 
Aujourd'hui responsable du musée, il raconte mieux que personne l'histoire du riz en Camargue.


C'est donc guidés par ce fameux "riziculteur-conteur" que nous effectuons la visite...

"1 grain de riz semé en donne 3 à 4 000 à la récolte"

Nous apprendrons que c'est au printemps (entre le 15 avril et fin mai) que le riz est semé. Les champs sont alors recouverts d'une fine couche d'eau reflétant la lumière comme un miroir. Il faut attendre trois semaines pour voir les premières pousses sortir de l'eau et former un joli tapis vert tendre. La période qui suit est le tallage, moment où le brin maître donne naissance à des ramifications porteuses des grains à venir. Quand vient l'été, les champs changent de couleur et deviennent vert intense. C'est le moment de l'épiaison suivie de la floraison éphémère où la délicate fleur ne dure que quelques heures. Après cela, les rizières changent une fois encore de couleur et virent du vert au jaune puis au doré qui achève le cycle. La récolte ne se fera qu'à l'automne, entre le 15 septembre et le 15 octobre.

Nous apprendrons aussi que le riz, de son nom scientifique "oryza sativa" a deux origines mères : le Japonica (riz à grains ronds) et l'Indica (riz à grains allongés). Le nom "paddy" désigne quand à lui les grains tels qu'ils sont récoltés, c'est à dire vêtus de leur enveloppe.

Nous apprendrons enfin que les premiers essais de culture du riz remontent au milieu du XIXe siècle, mais que c'est seulement après la Seconde Guerre Mondiale que la culture du riz se met réellement en place en Camargue. Le riz étant la seule culture qui oblige les paysans à inonder leurs champs d'eau douce (1 kg de riz nécessite entre 5 000 et 6 000 litres d'eau douce), cela permettra de dessaler la terre.

Mais ce n'est pas tout... Il y a une partie de l'histoire du riz que beaucoup ignorent et qui mérite d'être contée. C'est l'histoire de ces paysans vietnamiens débarqués en France contre leur volonté et qui ont participé à la relance de la riziculture camarguaise.

20 000 travailleurs et 15 000 soldats indochinois (ou vietnamiens) ont été réquisitionnés en 1939-40 pour soutenir l'effort de guerre de la France durant la seconde Guerre Mondiale. Presque la totalité de ces hommes étaient de bons paysans du Viêt Nam profond.
Après l'Armistice en 1940, les 20 000 vietnamiens ont enduré un exil forcé sur le sol de la France pendant 8 ans (1940-1948). Ainsi certains d'entre eux ont eu le temps d'assécher les marécages de Camargue et y planter le riz.
Voilà donc comment est née la culture du riz sur les terres de Provence.

Dans toute la Camargue, le Musée du Riz du Petit Manusclat est le seul endroit qui évoque le rôle essentiel de ces indochinois dans l'histoire de la région.

Musée du Riz du Petit Manusclat
Petit Manusclat - Le Sambuc, 13200 Arles

5 km après le Sambuc, sur la gauche
Tél : 04 90 97 20 29
Fax : 04 90 97 21 84
musee@heureuse-camargue.com

Je terminerai en vous livrant une petite recette, celle du Riz Rouge de Camargue...

Ingrédients

* 250 g de riz rouge de Camargue Bongran
* 200 g de beurre
* 150 cl d'eau
* 4 gousses d'aïl en chemise
* thym
* 2 feuilles de laurier
* sel/poivre


Faites rissoler le riz dans 100 g de beurre, puis ajoutez l'assaisonnement et les aromates. Versez l'eau froide, puis laissez cuire doucement à couvert jusqu'à ce que le riz ait tout absorbé. Renversez le riz dans un grand plat puis parsemez-le avec le reste du beurre. Servez sans attendre.

La cuisson du riz doit être lente et douce (25-30 mn).

Cette recette est tirée du livre Le Riz dans tous ses états aux éditions Actes Sud.
Je ne l'ai pas encore testée, mais ça ne saurait tarder ;-)

1 commentaire:

  1. Julia,

    merci de n'avoir pas oublié le rôle de ces paysans indochinois dans la création de la riziculture française.

    Joël
    http://www.travailleurs-indochinois.org

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